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mardi 6 septembre 2005

Changer le monde... ou rien?

Je reviens juste d'une réunion avec Abdou Menebhi de l'Emcemo. Nous sommes sensés organiser un débat à l'occasion de l'anniversaire de l'assassinat de Theo van Gogh, avec pour objectif d'infléchir la discussion autour de l'immigration, l'Islam, l'intégration et l'identité néerlandaise. Pour l'instant j'ai surtout vu beaucoup de papier et d'affiches, mais je n'ai pas vu beaucoup de militants. Je me demande s'ils existent.
Je dois rédiger une invitation pour les associations et les intellectuels pour prendre part au débat, mais je me demande si cela va servir à quelque chose. Je pense que les débats ne vont pas changer grand-chose: la politique néerlandaise est bien trop pragmatique, dans une posture anti-intellectuelle et super-populiste, pour être capable d'infléchir ses actions "par le haut", in abstracto.
Je pense qu'il faut prendre pour modèle Act Up: former des petits groupes d'experts qui vont aller défendre pied à pied dans les ministères et les débats les thèses du groupe, s'inviter (de force) dans les média et stigmatiser les pratiques intolérables (à commencer par Verdonk qui mérite un zap!), ne rien laisser passer.
Une idée qui semble plaire à Menebhi est un observatoire de la citoyenneté. J'avais lancé l'idée comme une solution possible, mais il a l'air d'adorer. Le problème est qu'un tel observatoire ne marche que s'il fait preuve de sa neutralité. Or une telle structure a tendance à attirer tous les arrivistes et les suceurs de budget de fonctionnement.

J'ai une réunion avec Levina de Raat, coordinatrice de la campagne travailliste à Amsterdam, ce vendredi. Elle semble intéressée à l'idée de faire bosser les militants sur l'intégration (en particulier, parce que j'ai insisté, des Européens). J'ai peur que, comme d'habitude, il ne s'agisse d'actions symboliques ne menant nulle part, pour brosser l'électorat allochtone dans le sens du poil et surtout les bourgeois amstellodamois gauchistes et tiers-mondistes qui se sentent très coupables d'avoir tant d'argent pour si peu de travail. Cela me rappelle l'article de Gilles Kepel dans Le Monde (http://www.minorites.org/article.php?IDA=11621 même si sa haine du multiculturalisme m'agaçe: voir aussi http://www.minorites.org/article.php?IDA=10915 ), dans lequel il raconte que le multiculturalisme à l'anglaise a perduré car il a permis à la droite d'employer les Pakis bien soumis pour pas cher, et aux travaillistes de soigner un clientélisme ethnique bien discipliné lors des élections. Dans le cas néerlandais, l'analyse kepellienne pourrait assez bien s'appliquer.

Comme on dit, qui vivra verra.