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lundi 6 juin 2005

We are Europe °

Quand on lit les études sur la jeunesse européenne, le sentiment national et l'identité, ce qui frappe c'est le fait que l'identité des Européens converge incroyablement. On y retrouve une foi en:
- les droits de l'homme et la justesse de l'interdiction de la peine de mort
- la démocratie (participative, si possible)
- le modèle social européen (c'est à dire le filet social, l'accès universel au système de santé, l'assurance chômage et un droit du travail assez musclé)
- le capitalisme comme source de richesse personnelle et collective
- un devoir écologique envers soi et les générations futures
- la paix et le développement harmonieux avec les autres pays
- la tolérance religieuse au sein d'un système que les Français appeleraient laïc, mais sans sa dimension anticléricale
- la tolérance sociale (avortement, euthanasie, drogues douces, homosexualité, trans-sexualité, couples mixtes, etc.)
On y retrouve aussi:
- la haine du fascisme et du racisme (les parties les plus sombres de l'histoire européenne, colonialisme, nazisme et discriminations, ont été digérées et font partie de l'identité européenne au sens où tout doit être fait pour empêcher que cela recommence un jour)
- une peur du capitalisme sauvage (les Français diront à l'anglo-saxonne, mais je crois que c'est une forme d'ethnocentrisme, le capitalisme néo-colonial français ou les patrons hexagonaux racistes et réactionnaires étant trop souvent ignorés)
- le rejet de la violence physique, aussi bien étatique (armée, police, école) qu'individuelle
- une morale publique vis-à-vis des postes importants (rejet de la corruption en politique, des salaires trop élevés pour les chefs d'entreprise...)

Bref, il y a un projet moral et politique européen: une Europe morale (au sens humaniste du terme), solidaire, post-nationale, tolérante et pacifique. Cela peut ressembler à une forme d'utopie. Et c'est justement ça qui est fort: on ne peut pas construire un ensemble de 450 millions de personnes (bientôt plus) parlant des langues différentes, s'étendant de l'Afrique du nord au cercle polaire, sans une utopie forte. La nation française dit s'être forgée sur la langue et une volonté de vivre ensemble. L'identité européenne est là, elle existe: dépasser la nation et ses conséquences (rejet des minorités, guerres, nationalisme, haine de l'autre) par un projet post-national, généreux et universaliste.
Mais ceux qui ont négocié le traité qui vient d'être rejetté, comme ceux qui sont au pouvoir en ce moment, ne sont pas des Européens. Ce sont encore des Français, des Allemands ou des Polonais. Il existe certes une jeunesse xénophobe, ignorante, extrêmiste et nationaliste. Mais leurs aînés le sont aussi, et ces jeunes sont une minorité. Nous, les Européens ayant grandi en apprenant la langue des voisins, ayant parcouru l'Europe et parfois le monde (où on se rend compte que nous sommes Européens avant d'être Français ou Néerlandais), ayant parfois même épousé d'autres Européens (du même pays ou d'un autre), nous savons ce que nous voulons.
Nous voulons un parlement européen fort et démocratique. Une Europe forte pas uniquement matériellement, mais surtout capable d'améliorer le sort de ses habitants et des autres humains. Un respect des cultures et des langues sans tomber dans le nationalisme ou l'exclusion. Nous voulons que la démocratie franchisse une étape supplémentaire et s'affranchisse des bidouillages électoraux et politiques propres au XXème siècle.
Nous voulons pouvoir créer l'Europe telle qu'on la rêve, pas subir la gestion sans vision d'un ensemble de pays semi-autoritaires qui font leur marché ensemble mais qui n'arrivent pas à dépasser leur identité xénophobe et dont les leaders ont fait la preuve de leur efficacité.


Dessin de Antonio (cartouniste portugais)
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NdLC: Pour ceux qui ont besoin d'un dessin pour comprendre, une carte de mon pays... Et oui, à terme, il va falloir accueillir le Maghreb, la Turquie, le reste de l'Europe de l'Est, et il va falloir songer à une forme d'association avec la Russie, dont la jeunesse rêve aussi de démocratie et de prospérité collective (et pas uniquement matérielle)... Et, pourquoi pas, Israël/Palestine et le Liban...
Clairement, ce n'est pas en mettant ses habitants en compétition les uns avec les autres qu'on construira quelque chose de solide. Et c'est peut-être la leçon du référendum...


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Brieuc-Yves zegt: "Cette combinaison d'esprit européen international, interculturel se retrouve dans le réseau United. Fondé par d'anciens collaborateurs du Centre Européen de la Jeunesse, il se centre sur la question de l'interculturel et des échanges européens et internationaux. United est financé par l'Europe. United: http://www.united.non-profit.nl/"