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dimanche 11 mars 2007

Nationalité et loyauté, rappel historique

J'ai lu un article passionnant dans lequel un historien compare les Pays-Bas en 2002 et en 1850. Selon Marlou Schover, historienne des migrations à l'université de Leyden, les Allemands catholiques qui avaient immigré aux Pays-Bas étaient accusés des mêmes maux que les Turcs et Marocains aujourd'hui. En pleine naissance du nationalisme, les Néerlandais on changé le jus soli (droit du sol, hérité de Napoléon) en jus sanguinis (doit du sang) pour éviter que les "colorés" des colonies ne deviennent aussi néerlandais (tiens, tiens, ça me rappelle des discussions sur les Antillais). S'ajoute donc en 1892 l'exigence d'être né de parents et grands-parents néerlandais, qu'on retrouve aujourd'hui dans la définition de l'autochtone. Les enfants et petits-enfants de migrants restent donc des étrangers, même s'ils sont eux-même über-néerlandisés.

Par ailleurs, les Allemands sont surtout vus comme des catholiques dans un pays qui s'imagine encore protestant (comme aujourd'hui certains sont vus comme des musulmans dans un pays qui s'imagine chrétien). Vers 1850 commence une psychose anti-romaine: les employés catholiques sont virés, beaucoup sont refoulés à la frontière. On associe systématiquement nationalité étrangère (obligatoire puisque ces migrants ne peuvent pas prétendre à la néerlandité) et traîtrise: on parle de révolutionnaires (l'équivalent XIXème d'islamiste), plus tard d'espions à la solde de l'Allemagne, et le besoin d'une distinction entre "vrais" néerlandais et les "faux" toujours susceptibles de trahir la patrie ne prend fin partiellement qu'en 1953.
Selon l'historienne, on se retrouve avec Wilders dans exactement la même situation: le mélange de la nationalité et de la loyauté "quand tu fais l'effort de te faire naturaliser Néerlandais, tu indiques pourtant clairement où penche ta loyauté la plus importante, non?"

Intéressante, cette Schover: "il ne faut pas confondre loyauté et nationalité. Il y a des députés qui défendent les intérêts des paysans en étant paysans eux-même. Mais on n'entend rien à ce sujet. N'est-ce pourtant pas aussi une loyauté? Balkenende va taire certaines choses parce qu'il est chrétien, c'est la loyauté au christianisme. Pas de problème. Mais il faut être clair sur la question."
Schover a une solution simple: arrêter d'inscrire la nationalité d'origine des gens qui deviennent néerlandais. Quand on est Néerlandais, on est Néerlandais, point, comme aux Etats-Unis: on est Américain, c'est tout.

Je suis assez d'accord avec elle. Pas vous?