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jeudi 15 juin 2006

Thé à la mosquée

La semaine dernière, j'étais invité, tout comme les autres conseillers municipaux, à la mosquée turque du quartier (Selimiye Moskee) pour prendre le thé. En fait la mosquée est située dans une ancienne école qui est partagée par plusieurs associations. Les Turcs ont leur propre morceau d'immeuble, avec un supermarché au rez-de-chaussée, la mosquée au 1er étage, et un café sous les combles. J'étais le seul travailliste, il y avait les centristes du D66 (l'ex-échevin Joep Blaas et son jeune page) ainsi qu'une écolo, en la présence distinguée d'Anna Schoemaker.
L'idée était d'organiser une discussion sur l'égalité homme/femme et de dialoguer entre les cultures. J'ai trouvé le thème un peu galvaudé, et surtout le fait qu'il y avait au moins 80% de Hollandais un peu étrange pour une soirée interculturelle. Mais bon, c'est déjà un début.
Nous avons été bien accueillis, et bien nourris. Mais la discussion m'a laissé sur ma faim. Je me suis senti vraiment radicalement féministe, même vis-à-vis des femmes hollandaises. Mon interlocuteur turc (on a fait des petits groupes pour discuter) a fait preuve d'un conservatisme assez hallucinant: l'homme montre son respect en protégeant sa femme des autres hommes, et la femme montre son respect en cuisinant pour l'homme et en lui faisant des enfants, surtout des fils si elle le peut. Peut-être un modèle modernissime dans les villages reculés d'Anatolie, mais en plein quartier du Pijp, ça avait quelque chose de délicieusement surrané. Une sorte d'exotisme de parentèle en plein quartier post-moderne.
Les femmes hollandaises, elles, disaient que leur choix de ne pas travailler pour élever les enfants était la preuve de leur émancipation, en particulier parce qu'elle connaissaient quelqu'un qui connaissait quelqu'un qui connaissait une famille dont c'était le père qui restait à la maison. Le vieux truc du contre-exemple qui est utilisé contre les Noirs aux Etats-Unis: vous pouvez vous émanciper parce qu'il y a quelques rappeurs et basketteurs millionnaires. Pareil ici: les femmes sont libres et émancipées parce qu'il existe, quelque part, des pères qui ont choisi de rester à la maison.
Bref, un début de discussion intéressante mais personne ne veut vraiment se poser trop de questions. Ce n'était pas le but de la soirée, anyway. C'était de commencer à apprendre à se connaître. Et c'est ce qu'on a fait, même si on s'est fait un peu peur, secrètement, les uns les autres.