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mardi 25 mars 2008

Alors, crise ou pas?

L'économie un sujet auquel je ne peux m'empêcher de penser quotidiennement. Je sais je suis bizarre, peut-être est-ce dû à mon relatif recul sur la question au niveau théorique, mais aussi au fait que j'ai le nez dedans en tant qu'élu...

Pour l'instant, tout le monde est enthousiaste aux Pays-Bas dès qu'il s'agit d'économie. On a jeté des projets sociaux ici dans Oud Zuid parce que l'économie est tellement demandeuse de main d'œuvre que même les jeunes allochtones non-diplômés trouvent un emploi. Mais, croyez-moi, ça ne va pas durer. Et j'ai comme l'impression que personne ne cherche à se préparer.

Pourquoi je pense que la crise va frapper et ne passera pas rapidement? C'est très simple: les salaires et l'endettement. Les Pays-Bas sont globalement devenus riches, et à Oud Zuid nous avons de plus en plus de riches, mais cette richesse ne profite pas à tous, loin de là. Cela fait bien longtemps que les différences entre riches et pauvres n'ont été aussi grandes ici, comme dans le reste de l'Occident. La plupart des classes moyennes ont dû s'endetter sur au moins 30 ans pour se loger (à des prix vraiment ridiculement élevés) et le niveau de vie net a baissé, même avec l'arrivée des femmes sur le marché du travail.
Ceux qui continuent à consommer comme des riches le font grâce au crédit. Je connais tellement de gens qui vivent à crédit que j'en suis à croire que l'essentiel des classes moyennes néerlandaises vit à crédit. Enfin, beaucoup de gens sont condamnés à vivre dans la précarité, tant les boulots stables et bien payés se font de plus en plus rares. L'idée d'avoir un travail plus de cinq ans de suite est presque devenu de la science fiction. Cette précarité a un coût: l'endettement pour maintenir son niveau de vie et assurer la transition entre deux boulots (une transition qui peut être bien longue en cas de récession).

Quand je lis ce qui se passe aux États-Unis et en Grande-Bretagne, où la croissance a essentiellement été créée par l'endettement des classes moyennes (dont le revenu net baisse) et des classes inférieures (dont le revenu a largement baissé et dont la précarité s'est grandement accru), et que je pense à ce qui est en train de se passer (remise à zéro des compteurs avec des millions de personnes en faillite personnelle et expulsés de leur logement), je ne peux m'empêcher de penser à ce qui va se passer aux Pays-Bas.
Certes, la plupart des gens seront sauvés d'une manière ou d'une autre via l'État-providence (si les politiques ne l'auront pas complètement démantelé d'ici là) et ne finiront pas à la rue, mais je prévois de la casse. Comme d'habitude, les premiers à payer seront les jeunes, les femmes et les allochtones. Au-delà du problème purement économique (perdre sa maison, être mis en faillite), c'est le coût social qui risque d'être énorme: tensions politiques, tensions familiales, dépressions, émeutes...

Je peux vous assurer qu'ici, à Oud Zuid, nous ne sommes pas prêts du tout à faire face à un coup dur: tout le monde fait comme si tout le monde allait devenir riche et que l'économie allait croître infiniment pour toujours. S'il y a un vraie remise à zéro des compteurs de l'économie occidentale, ça va chauffer.

Je suis peut-être pessimiste mais j'ai parfois l'impression de vivre les derniers moments d'une époque, celle où on consommait comme si demain n'existait pas, où on gaspille l'énergie, le plastique et la nourriture, et où on traite les migrants comme des voleurs alors que les Occidentaux pillent la planète.
Je viens de lire un constat assez impressionnant sur le manque de vision de nos politiques sur la question depuis 30 ans: il est temps que la gauche européenne se réveille de son rêve néo-libéral et pense à l'avenir des Européens. N'hésitez pas à signer la pétition...