Hier j'étais à l'assemblée générale du parti travailliste d'Amsterdam, dans un ancien temple reconverti en salle de concert et conférences. Très bel endroit, donc. Le but de cette assemblée était d'élire les 2 représentants amstellodamois au forum politique du parti (un organe qui représente la société civile et doit fournir des idées neuves au parti), approuver le budget et discuter du programme de gouvernement du parti au niveau de la ville.
L'élection des représentants au forum était un monument de consensus néerlandais: des candidats intéressants, un vote de type démocratique, mais quand on voit les résultats (les deux représentantes ont été élues avec une avance très confortable par rapport aux autres candidats), on se dit que ce vote n'arrivait pas de nulle part. Il y avait eu un semblant de campagne non-officielle, ce qui est conforme à tout ce que j'ai vu pour l'instant: les candidats gagnants semblent pré-sélectionnés de manière mystérieuse et obtiennent une quasi-unanimité sortie mystérieusement des urnes. Une fois encore, le noyau informel du pouvoir n'est pas inactif. Notre fonction était d'applaudir, applaudir, encore applaudir, et voter comme il en avait été convenu.
Quand à la défense du programme de gouvernement par la tête de liste, le jeune Lodewijs Asscher (photo de son bouquin ci-contre à gauche), elle était bien faite et bien pensée. Sauf à trois moments qui m'ont mis mal à l'aise.
Premier moment: une femme un peu âgée demande la parole et se met à louer de façon presqu'obscène Asscher, ce "super mec" qui dit ce qu'il pense et fait ce qu'il dit. Cette démonstration de soumission au chef (mon chien fait pareil avec sa langue) a été chaudement applaudi, mais j'étais extrêmement gêné. Peut-être est-ce ma francitude, peut-être cette gêne indique quelque chose de plus profond. On en reparlera.
Deuxième moment: Asscher est attaqué sur la gestion calamiteuse du thème minoritaire par Wouter Bos (vraissemblablement le prochain premier ministre) qui s'était plaint de la mauvaise qualité des élus allochtones. Au lieu de célébrer l'évidente avance du parti travailliste sur ce thème (il reste quasiment le seul parti à ne pas être 100% blanc), le voilà sur la défensive. Oh là là, Lodewijk, il va falloir bosser là-dessus. Dans une ville comme Amsterdam où 50% de la population est allochtone, il serait peut-être temps de maîtriser le sujet.
Troisième moment: Lodewijk Asscher (tête de liste et nouveau échevin) et Ahmed Aboutaleb (second de liste et aussi échevin, qui sur son seul nom a obtenu 8 des 20 sièges du parti, photo ci-contre à droite) se font des déclarations d'amour en public. On pense pareil, on en est presque télépathes, on s'adore, on a réussi la campagne à deux. Bref, c'est l'amour à fond. Là encore, j'ai très envie d'y croire mais je suis loin d'être convaincu. Mon "gut feeling", comme on dit (intuition), me dit plutôt qu'ils ont fait la campagne ensemble afin qu'aucun des deux ne dépasse l'autre, et qu'ils sont loin de s'aimer autant qu'ils le déclarent. Par ailleurs, s'ils ont tellement besoin d'insister là-dessus en public, c'est peut-être que ce n'est finalement pas si évident que ça.
Je ne préjuge de rien, peut-être me trompé-je lourdement, peut-être que Lodewijk et Ahmed s'aiment d'un amour réel, mais disons que mon intuition se révèle souvent juste et que là ça sent bizarre. Mais bon, par ailleurs, j'ai pu rencontrer des gens intéressants dont je parlerai plus tard...