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samedi 7 avril 2007

Déceptions, agoisses

Ces derners jours, j'ai enchaîné les déceptions. Je suis allé quelques jours à Paris me resourcer, passer du temps avec la famille et quelques amis (même si je n'ai pas pu tous les voir), mais le retour à Amsterdam en a été d'autant plus difficile. M'y attendaient des trahisons politiques et des magouillages minables. Je me suis demandé un moment comment j'avais pu me mettre dans une telle situation. C'est clair qu'en politique on n'est sensé faire confiance à personne, mais je m'attendais à plus de certains. Les déceptions amicales peuvent être terribles, presqu'aussi glaçantes que le déceptions amoureuses, finalement.
J'ai quand même pu discuter avec des gens intéressants. Une psychanaliste par exemple, amie d'une amie, qui m'a remis les choses à leur place. Elle m'a montré que je me surinvestissais émotionnellement dans la politique, à faire confiance aux mauvaises personnes, à ne pas écouter mon instinct, et que j'avais intériorisé une part de la xénophobie ambiante en essayant de dissimuler mes traits culturels français, surtout en public. Ma prise de poids, mon habillement approximatif, le fait que j'essaye de cacher en partie mon éducation (familiale et nationale), le fait que je n'insiste pas assez sur certains points (je ne peux pas parler publiquement de certains sujets politiques ou associatifs, mais que ceux qui sont curieux m'écrivent ou m'appellent), tout cela ne m'est pas formellement interdit, mais suggéré en partie par mes pairs, et en partie par moi-même.
Un autre chose dont elle m'a parlé est le terrorisme médiocratique. Même si ce n'est pas facile, surtout aux Pays-Bas où on professe ad nauseam le doe maar gewoon ("sois normal"), il ne faut pas selon elle hésiter à afficher sa croyance en des principes abstraits et supérieurs, comme la laïcité, la gratuité et le partage, le sens du collectif, le goût des débats d'idées... quitte à être montré du doigt, car selon elle vaut mieux la méfiance des autres que la haine de soi.

Sinon à Paris j'ai dîné avec deux amis designer (un mâle, une femelle) qui ont un talent fou et ça m'a fait du bien de voir des gens soulevés par leur passion pour l'art. Paris était comme une ville occupée, avec ces troupes de CRS et de gendarmes, la mitraillette à l'épaule, le contrôle d'identité facile et la moue arrogante de ceux qui se savent en situation d'impunité. Voir tant de beauté et de création, de mélanges et de talents tellement cernés de forces réactionnaires et du sarkozysme totalitaire d'Etat m'a déprimé.
Les périodes électorales sont toujours source d'angoisses. A travers mon expérience personnelle mais aussi ce que j'ai appris à l'université, je sais qu'un vote a priori insignifiant peut avoir des conséquences dramatiques. On l'a vu ces cinq dernières années aux Pays-Bas, on l'a vu avec le "non" au traité européen, on l'a vu avec cinq ans de sarko-chiraquie... le pire est qu'une partie des gens avec qui je discute n'ont pas l'air de s'en rendre vraiment compte. Encore quelques semaines avant les élections, et je sens grandir en moi cette peur que la France s'enfonce dans la dictature ou le sabotage permanant... Suspense.